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Le syndicalisme n’est pas un crime, les militants pas des terroristes

28 novembre, 2020Déclaration du Conseil de Global Unions à l’occasion de la journée d’action sur les Philippines 

Dans la période la plus sombre depuis la fin de la dictature du président Marcos en 1986, le mouvement syndical aux Philippines s’est rassemblé pour lutter et sauver la démocratie. Le Conseil de Global Unions (CGU) l’a rejoint et soutient sa lutte. Ce 30 novembre marquait la dernière mobilisation en date de Global Unions. Cette journée d’action a mis en lumière la progression du despotisme et appelle le gouvernement des Philippines à respecter ses engagements internationaux en matière de droits de l’homme.

 

Sous le régime du Président Duterte, les syndicats, les médias et les journalistes indépendants, les hommes politiques de l’opposition et les défenseurs des droits de l’homme ont été victimes d’attaques incessantes. Les autorités gouvernementales ont orchestré le harcèlement, qui vise souvent les femmes et les représentants des peuples indigènes et des groupes défavorisés, le “red-tagging” et la désinformation sur les médias sociaux.

Selon un rapport de la Commission des droits de l’homme des Nations unies publié en juin, “Facebook a supprimé au moins 200 publications relevant de comportements inauthentiques coordonnés et constatés sur des pages, groupes et comptes de Facebook et d’Instagram qui étaient liés à un réseau organisé par le responsable des médias sociaux de la campagne électorale du Président”. Selon le même rapport, “La rhétorique nuisible des plus hauts niveaux du gouvernement a été omniprésente et profondément préjudiciable. Certaines déclarations ont atteint un niveau que l’on peut qualifier d’incitation à la violence.”

Les détentions, les arrestations, les procès basés sur de fausses preuves et le red-tagging se sont accélérés. Le nombre de syndicalistes, de journalistes et de défenseurs des droits de l’homme assassinés ne cesse d’augmenter. À de rares exceptions près, ces abus se produisent en toute impunité. Des exemples dramatiques de la répression de la presse libre sont la condamnation du PDG des médias Maria Ressa pour “cyberdiffamation” et l’arrêt de la diffusion d’ABS-CBN. La manipulation des médias sociaux, cependant, occulte ces violations des droits de l’homme pour une grande partie de la population.

Le red-tagging (littéralement : “étiquetage rouge”) est de plus en plus fréquent. Cette pratique, consistant à étiqueter des individus ou des groupes comme étant des terroristes communistes, a entraîné des menaces et de la violence. Dans certains cas, il s’agit en fait d’une condamnation à mort.

La protection juridique des droits de l’homme, déjà faible, y compris la liberté syndicale et d’expression, a subi un nouveau coup dur avec l’adoption de la loi antiterroriste en juillet. Cette loi a élargi et rendu plus arbitraire la législation existante. Elle élargit la définition du terrorisme pour intimider la dissidence et l’opposition et permet la détention sans mandat pendant trois à quatorze jours, renouvelable pour dix jours supplémentaires. C’est un autre instrument pour terroriser ceux qui osent parler et s’organiser en les accusant d’être des terroristes.

Le CGU appelle une nouvelle fois le gouvernement des Philippines à mettre fin à ses violations des droits de l’homme et à rejoindre la famille des nations démocratiques. Cependant, nos appels ainsi que les décisions répétées de l’Organisation internationale du travail et du Conseil des droits de l’homme des Nations unies ont été ignorés ou ont donné lieu, au mieux, à des promesses creuses.

Le Parlement européen a adopté une Résolution sur la situation aux Philippines, y compris le cas de Maria Ressa. Elle détaille les violations des droits de l’homme et demande à la Commission européenne de revoir le SPG+, qui offre au pays un accès privilégié au marché européen. Il existe des systèmes SPG ailleurs, notamment aux États-Unis, un important partenaire commercial des Philippines.

Les gouvernements, individuellement et collectivement, doivent faire savoir clairement qu’ils ne toléreront pas les atrocités du gouvernement philippin en maintenant des accords économiques favorables, tandis que les entreprises et les acteurs économiques doivent respecter les normes universelles des droits de l’homme dans le pays, y compris dans leurs chaînes d’approvisionnement, et ne pas tirer profit des faiblesses des processus et des réglementations commerciales.

La démocratie est dans un état critique aux Philippines, mais elle n’est pas encore morte. C’est parce que de nombreux Philippins courageux se battent pour elle. Le peuple philippin a besoin du soutien mondial qu’il mérite et il en a besoin de toute urgence. C’est le moment pour les gouvernements qui soutiennent les droits de l’homme universels de sortir du rang et de montrer que leurs engagements ne sont pas que des mots.