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Un travailleur de Saint-Gobain Inde licencié pour maladie professionnelle

17 mars, 2020Jayaraj Mathangi, un ancien travailleur de Saint-Gobain Crystals and Detectors à Bangalore, en Inde, a été licencié au motif d'absentéisme après avoir développé de graves problèmes de santé à cause des risques auxquels il était exposé dans son activité professionnelle.

Son employeur l'a licencié en 2016 après des années de service. En plus de son emploi, il a perdu son assurance-maladie, qui couvrait aussi son épouse et ses parents dont il a la charge. Jayaraj Mathangi, qui est âgé de 35 ans, mène le combat pour ses droits et réclame sa réintégration ainsi qu'une indemnisation pour son état de santé.

Il a commencé à travailler chez Saint-Gobain en août 2008 en tant que stagiaire et, après trois ans, il est devenu technicien de production en février 2011, dans le département du contrôle de qualité.

Le travail de Jayaraj consistait à contrôler chaque jour 300 à 400 cristaux de tungstate de cadmium. Normalement transparents, les cristaux de tungstate de cadmium émettent de la lumière lorsqu'ils sont exposés à un rayonnement X ou gamma, et sont utilisés pour la fabrication de détecteurs à scintillation. Pour tester et calibrer les détecteurs, les travailleurs utilisent du césium 137, un élément radioactif. Le cadmium et le césium sont extrêmement dangereux et doivent être manipulés avec le plus grand soin.

À partir de 2012, Jayaraj a constaté une nette dégradation de sa santé. Il souffrait de maux de tête, de douleurs et d'insensibilité dans les jambes. Il en a informé la direction qui n'a rien fait. Il a consulté des médecins et des analyses ont révélé que le taux de cadmium dans son sang était trois à quatre fois supérieur au maximum tolérable. Il avait des taux élevés de globules rouges et de lymphocytes, des taux anormaux de glucose et des taux trop bas de vitamine D et de calcium. Les diagnostics montraient aussi qu'il souffrait de bronchite, de crampes musculaires et de ramollissement des os.

Bien qu'il soit difficile de démontrer que toutes ces affections sont liées au travail, beaucoup peuvent être provoquées ou aggravées par la toxicité du cadmium et par le rayonnement. Jayaraj est encore en traitement à l'heure actuelle, mais il a été licencié en 2016 pour cause d'absentéisme prolongé.

Les travailleurs ont créé un syndicat dans l'entreprise en 2012. La nouvelle organisation a alors voulu s'attaquer à la question de la santé et de la sécurité, et notamment au cas de Jayaraj. La direction a licencié les travailleurs syndiqués et a offert à d'autres de légères hausses de salaires en échange d'une promesse écrite de s'abstenir de toute activité syndicale à l'avenir. Les salariés de l'entreprise n'ont toujours pas de représentation.

La situation ne s'est pas améliorée, faute d'un syndicat ou d'un organe paritaire de santé et de sécurité représentant les intérêts des travailleurs. Finalement, les dirigeants de l'entreprise ont été reconnus coupables et condamnés par un tribunal de Bangalore, à la suite d'inspections réalisées en 2009 et 2016 dont le rapport cite nommément le cas de Jayaraj et confirme que des teneurs excessives en cadmium ont été trouvées dans le sang de nombreux travailleurs de son département.

L'inspecteur de l'Agence nationale de régulation de l'énergie atomique a constaté que les travailleurs manipulaient à mains nues les conteneurs en plomb scellés contenant des matières radioactives et a recommandé l'utilisation de pinces. Jayaraj a révélé que, pendant l'inspection, seules les conditions de sécurité en rapport avec les sources de rayonnement ont été contrôlées, lesquelles avaient été améliorées peu avant à la suite de sa plainte précédente. L'inspecteur n'a pas visité le département de contrôle de la qualité pour constater l'indigence des conditions de sécurité qui y régnaient.

Dans ses Principes de comportement et d'action, Saint-Gobain s'engage "à prendre les mesures nécessaires pour assurer la meilleure protection possible de la santé et de la sécurité dans le milieu du travail". Les sociétés du Groupe "veillent scrupuleusement au respect des droits des employés. Elles assurent un dialogue social actif". Aucun de ces principes n'a été appliqué chez Saint-Gobain Crystals and Detectors à Bangalore.

Le Secrétaire général d'IndustriALL, Valter Sanches, a envoyé une lettre au groupe pour réclamer une enquête digne de ce nom sur les problèmes constatés et des mesures adéquates pour remédier à la situation et l'améliorer, y compris mais non seulement :

  • la réintégration de Jayaraj Mathangi avec paiement du manque à gagner, y compris toutes les augmentations, arriérés, primes et autres prestations dues depuis juillet 2006;
  • le versement d'une indemnisation médicale adéquate à Jayaraj Mathangi;
  • une enquête sur la situation de fait afin d'éliminer les risques pour la santé liés à l'exposition au cadmium et à des matières radioactives;
  • permettre aux travailleurs de s'organiser librement, de constituer un syndicat de leur choix et d'y adhérer.