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Turquie: le gouvernement interdit une grève dans l’industrie métallurgique

26 janvier, 2018Le droit de faire grève est-il toujours en vigueur en Turquie? La réponse est clairement NON. Une grève de 130 000 travailleurs prévue le 2 février 2018 dans 179 sites répartis dans l’ensemble du secteur métallurgique en Turquie et touchant toutes les grandes multinationales, a été interdite par le gouvernement sous prétexte de « porter préjudice à la sécurité nationale ».

La grève a été annoncée par suite du conflit découlant de l’échec des négociations sectorielles entre les trois syndicats représentant les métallurgistes, dont les affiliés à IndustriALL, Birleşik Metal-İş et Çelik-İş, et l’Association des employeurs de l’industrie métallurgique (MESS).

La grève a été interdite par un décret gouvernemental publié dans la Gazette officielle le 26 janvier 2018, après avoir été signé, le 24 janvier, par le Président, le Premier ministre et l’ensemble des ministres siégeant au cabinet. Le décret énumère les 179 sites où la grève est interdite, dont ceux détenus par des multinationales telles que Thyssenkrupp, Bosch, Ford, Mercedes Benz, Renault et Siemens.

Le jour où ce décret a été pris, l’organisation patronale MESS a invité les trois syndicats à une nouvelle session de négociation avant la date de la grève. Néanmoins, le décret interdit toutes nouvelles discussions entre le syndicat et les employeurs.

Les syndicats ont fait part d’un conflit par suite de l’échec des négociations survenu au début du mois de décembre 2017. Bien qu’un médiateur du gouvernement ait été nommé, le conflit n’a pas pu être résolu. L’offre finale de MESS a été rejetée par les trois syndicats les 11 et 12 janvier. Les salaires versés dans l’industrie métallurgique sont bas et les conditions de travail sont difficiles et dangereuses. Les syndicats réclament de nombreuses améliorations.

Le droit turc de 2012 sur les syndicats et la convention collective du travail, la loi N° 6356, renferme un article stipulant que « Tout appel à une grève légale, ou un lock-out, qui a été déclaré ou a commencé, peut être suspendu par un décret du Conseil des ministres pour une période de 60 jours s’il porte préjudice à la santé publique ou à la sécurité nationale ».

Le gouvernement turc, qui fait une utilisation abusive et régulière de cette loi, interdit souvent les grèves en violation de la Convention N° 87 sur le droit à la liberté syndicale. Les syndicats turcs ont fréquemment bravé ces interdictions et entrepris illégalement de faire grève. Il leur est arrivé de remporter des victoires importantes dans cette situation.

Birleşik Metal-İş a publié un communiqué de défiance indiquant:

« Nous ne reconnaissons pas l’interdiction de faire grève! Nous ferons grève le 2 février. Aujourd’hui, en tant que métallurgistes, nous répondrons à ceux qui interdisent notre grève en usant de notre capacité d’arrêter la production dans les lieux de travail ».

En réponse, les Secrétaires généraux d’IndustriALL Global Union IndustriAll Europe, Valter Sanches et Luc Triangle, ont écrit au gouvernement turc pour condamner l’interdiction de la grève, déclarant:

« Plusieurs grèves qui auraient dû avoir lieu dans différents secteurs ont été interdites 14 fois durant les conseils des ministres de l’actuel parti au pouvoir. Nous avons encore fraîchement en mémoire l’interdiction des grèves dans l’industrie métallurgique en janvier 2017.

« Comme nous avons déjà plusieurs fois critiqué explicitement cette politique, nous sommes obligés une fois encore d’exprimer notre profonde désapprobation à propos de la violation flagrante, par le Gouvernement turc, du droit fondamental des travailleurs de faire grève garanti par la Constitution de la Turquie ainsi que les conventions internationales du travail, et la jurisprudence de l’Organisation internationale du travail ».

Les Secrétaires généraux ont également envoyé une lettre de solidarité aux métallurgistes turcs par l’entremise des syndicats affiliés, indiquant:

« Nous réitérons l’engagement de nos organisations de demeurer solidaire avec vous tous. Vous n’êtes pas seuls. Votre combat est notre combat. Et nous continuerons à le soutenir jusqu’à ce que la justice règne dans les lieux de travail et la société ».