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Interview avec Jorge Alberto Monjane

12 décembre, 2010Secrétaire général adjoint du Syndicat des Travailleurs de la Chimie et Secteurs Connexes du Mozambique

Le travail par intérim et en sous-traitance est-il courant au Mozambique?

Pour le moment, nous ne savons pas s’il est fréquemment fait recours à ce genre de pratique. En septembre, nous avons découvert pour la première fois le recours à de la sous-traitance à Maputo, dans une usine de 1.700 travailleurs dont au moins 800 avaient des contrats à durée déterminée. Nous avons également découvert une autre usine, qui produit de la poudre à lessiver, dont tous les emplois sont intérimaires.

Davantage d’entreprises tirent parti de la nouvelle loi sur le travail de 2007 qui rend possible d’avoir des contrats à durée déterminée de trois mois, six mois ou un an. Les contrats à durée indéterminée étaient beaucoup plus fréquents avec l’ancienne loi. De nombreuses entreprises fonctionnent normalement, mais opèrent malgré tout des licenciements. Des contrats à durée déterminée ainsi que d’autres types d’emploi sont alors introduits.

La loi antérieure était plus stricte et offrait une meilleure protection des droits des travailleurs, mais les entreprises qui souhaitaient investir au Mozambique trouvaient cette loi trop rigide. La nouvelle fait fi de nombreux droits et, par exemple, les jours de congés ont été ramenés de 30 à 12 à 20 jours. Sous l’ancienne loi, il y avait une prime d’ancienneté, plus maintenant. Lorsque les salariés étaient licenciés, ils avaient droit en vertu de l’ancienne loi à trois mois de salaire s’ils avaient au moins deux ans d’ancienneté. Maintenant, ils n’ont plus droit qu’à 21 jours de salaire.

Comment sont les conditions pour les travailleurs CAL ?

Selon la loi, tout travailleur est sensé avoir les mêmes salaire et autres avantages. Cependant, souvent les employeurs ne respectent pas cette disposition. Il n’y a jamais de hausse de salaire pour les travailleurs CAL et les cotisations de sécurité sociale ne sont pas versées.

Nous avons connu un cas où un travailleur intérimaire dans une usine chimique a eu un accident alors que le sac qu’il transportait s’est rompu et que le produit lui a brûlé la peau. Le travailleur a demandé à l’entreprise de prendre en charge son traitement mais l’entreprise a dit qu’elle n’était pas responsable. Lorsqu’il s’est tourné vers l’agence, elle a également nié sa responsabilité. Finalement, le travailleur est décédé de ses blessures.

Nous avons pris conscience des problèmes en matière de santé et sécurité dans la sous-traitance et l’intérim lors d’un séminaire de l’ICEM au cours duquel des travailleurs ont expliqué qu’il y avait de grandes différences. Les travailleurs permanents voient leurs droits en matière de santé et sécurité respectés, mais pas les travailleurs sous-traitants. Notre syndicat doit approfondir la question, mais il est déjà clair pour nous que les employeurs ne considèrent la santé et la sécurité que comme un coût additionnel. Le syndicat exige des check-up médicaux pour tous et l’inspectorat du travail prend ces questions très au sérieux, surtout dans deux nouvelles usines, l’une textile, l’autre verrière, qui vont s’ouvrir. Notre syndicat est déjà présent pour tenter de s’assurer le droit de négocier et garantir le respect d’un environnement de travail sain et sûr.

Même si le gouvernement est en faveur de conditions raisonnables, les investisseurs étrangers souhaitent moins de réglementations et plus de flexibilité. Ils ont publiquement annoncé qu’ils souhaitent une nouvelle loi ! Le syndicat des Travailleurs de la Chimie et Secteurs Connexes du Mozambique a rejeté cette demande, la loi existante étant le résultat de lourdes négociations tripartites, chose que nous n’allons pas refaire.

Quelles sont les mesures prises par votre syndicat concernant le CAL?

A partir du moment où nous avons été conscients du problème, qui a été porté à notre attention dans le cadre du projet de l’ICEM qui nous a sensibilisés à la question, nous avons réagi très rapidement. Nous avons engrangé quelques succès en faisant changer l’attitude d’entreprises en leur faisant accepter des contrats de plus longue durée pour les travailleurs en sous-traitance.

Il est difficile pour nous de savoir ce qui se trame en coulisse, la situation étant très opaque, mais nous essayons de syndicaliser les travailleurs CAL. Nous avons déjà commencé à les inviter à nos réunions où on leur explique qu’ils ont les mêmes droits que toute autre personne. Il est difficile d’avoir accès aux travailleurs, alors nous les invitons dans nos locaux.

Les statuts de notre syndicat sont ouverts et la législation du travail dit que les travailleurs sont libres d’avoir des activités syndicales sur le lieu de travail ou en dehors, donc ce n’est pas un problème. Le LO FTF du Danemark nous a aussi beaucoup assisté en finançant la production de brochures et dépliants pour informer les travailleurs CAL de leurs droits. Grâce un projet financé par le LO FTF, nous sommes parvenus à prodiguer une assistance juridique aux membres en règle de cotisations, ce qui est un puissant outil pour recruter.

Quels sont les plans du syndicat des Travailleurs de la Chimie et Secteurs Connexes du Mozambique en ce qui concerne le CAL ?

Nous voulons étudier l’étendue du problème et informer les travailleurs sur leur droit à se syndiquer. Nous voulons aussi nous confronter aux entreprises et aux agences pour qu’elles reconnaissent que les droits fondamentaux des travailleurs doivent être respectés qu’ils soient des salariés directs ou pas.

L’ennui est que les entreprises veulent maintenir les travailleurs CAL dans l’ignorance de leurs droits et que les syndicalistes sont jetés dehors. Plus l’ignorance est grande, plus il y a d’exploitation. Lors de l’atelier organisé par l’ICEM, un travailleur a déclaré qu’il n’était pas sûr de pouvoir conserver son emploi en raison de sa participation à l’atelier, mais l’inspectorat du travail a déclaré qu’il allait le suivre et intervenir en cas de besoin.

Nous avons aussi prévu de collaborer avec l’inspectorat du travail pour enquêter sur les conditions de travail et les améliorer. Lorsque nous repérons un problème, nous créons une « brigade mixte » avec des représentants du syndicat et de l’inspectorat pour résoudre le problème. Les syndicats doivent être actifs pour encourager les inspecteurs du travail à bien faire leur travail et développer de bonnes relations avec eux.