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Les grévistes au Kirghizistan risquent 15 ans d’emprisonnement

13 mars, 2014De nouveaux amendements au code pénal ont été présentés qui signifient que les directeurs et le personnel des entreprises ayant une importance stratégique risquent jusqu’à 15 ans d’emprisonnement pour défaillance ou arrêt de la production.

À la fin de février 2014, des projets d’amendement au code pénal présentés au Parlement de la République du Kirghizistan, stipulent que "des actions ou des omissions de la direction ou d’autres membres du personnel d’entreprises ayant importance stratégique, qui causeraient un arrêt de la production de l’usine ou d’une subdivision structurelle, pourra être puni d’une peine d’emprisonnement de 8 à 12 ans. La même action qui aurait causé des dégâts considérables ou qui serait la cause de dégâts irrémédiables à l’environnement écologique dans le pays sera puni d’une peine d’emprisonnement de 10 à 15 ans".

En cas d’application, ce projet de loi touchera non seulement la direction, mais également les simples salariés des entreprises qui feraient grève. Il en résulte que des travailleurs et travailleuses employés dans un grand nombre d’entreprises déterminées par le gouvernement comme ayant une importance stratégique, se verront privé du droit de faire grève en dernier recours pour protéger leurs droits syndicaux légitimes. Dès à présent, les changements pourraient s’appliquer aux salariés d’une cinquantaine d’entreprises industrielles clés du Kirghizistan, et la liste pourrait être potentiellement plus importante.

IndustriALL Global Union et son affilié, le syndicat des mineurs et des métallurgistes du Kirghizistan (MMTUK), estiment qu’en cas d’adoption, ces amendements constitueraient une infraction flagrante aux normes internationales et constitutionnelles qui accordent le droit de grève aux travailleurs et travailleuses.

En réponse, IndustriAll a écrit au président de la République du Kirghizistan et à plusieurs responsables de haut rang, en exprimant ses préoccupations dans le cas où la présentation de ce projet de loi serait même envisagée en vue d’un débat au Parlement d’un pays civilisé comme le Kirghizistan.

Dans sa lettre, IndustriALL s’exprime en ces termes: "Le projet de loi qui est présenté démontre une incompétence et une irresponsabilité sociale de ses auteurs car il ferme le circuit juridique permettant une solution aux problèmes rencontrés par les salariés sur le plan social et dans le travail. L’expérience internationale montre que cela se traduit toujours par une tension sociale de plus en plus forte, qui finit par provoquer un éclatement dépassant l’entreprise qui a adopté une attitude politique agressive. Les forces politiques qui cherchent à renforcer leur influence et leur puissance par une déstabilisation de la situation se servent toujours d’un sentiment d’insatisfaction grandissant qui n’est pas résolu. Cela est particulièrement dangereux en République du Kirghizistan qui a connu deux révolutions ces dernières années".

Selon Eldar Tadzhibayev, président du MMTUK : "Le Kirghizistan a connu des bouleversements avec un changement de président en 2005 et 2010. Les investisseurs continuent d’éprouver des craintes en raison précisément de cette instabilité politique. Au niveau de l’entreprise, tout se passe normalement, mais maintenant, le projet de loi présente un danger pour le dialogue social et pourrait bloquer les canaux légitimes d’expression des plaintes et des litiges par les salariés, en raison de l’impossibilité d’utiliser la grève comme méthode permettant d’exercer une pression économique en dernier recours. Ce projet de loi risque de politiser les conflits du travail qui menacent l’ordre social beaucoup plus qu’une grève ou un arrêt de production, même dans les grandes entreprises prises individuellement.”

IndustriALL continue de suivre la situation pour empêcher l’effondrement du cadre juridique  de protection des droits et des intérêts des travailleurs et travailleuses en République du Kirghizistan.