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PROFIL : Divisés nous supplions, unis nous négocions, dit le syndicat d'Eswatini

15 décembre, 2021Pour le Syndicat général du Swaziland (ATUSWA), affilié à IndustriALL Global Union, l'unité des travailleurs et travailleuses et la négociation collective sont les piliers d'un syndicat fort. Sa stratégie de syndicalisation repose sur la lutte pour l'unité des travailleurs, leurs droits et des salaires vitaux. En ce sens, le syndicat est à la hauteur de son slogan : Divisés nous supplions, unis nous négocions.

Né en 2013 de la fusion de trois syndicats, dont le Syndicat des travailleurs du secteur de la transformation et des activités connexes (SPRAWU) et le MQAWUS, l’ATUSWA compte 4.000 membres, dont 65 % de femmes. Le maintien de la cohésion des membres est un énorme défi, mais le syndicat persévère, même après avoir fait face à des scissions. Selon lui, il y est parvenu en obtenant un consensus sur les questions essentielles.

Après des débuts mouvementés, l’ATUSWA avance contre vents et marées et continue d'augmenter le nombre de ses adhérents en syndiquant davantage de travailleurs et travailleuses dans le secteur du textile et de la confection ainsi que dans d'autres secteurs manufacturiers.

Une campagne typique de recrutement et de syndicalisation de l'ATUSWA consiste à se rendre sur place dans une usine, à attendre la pause déjeuner, puis à convaincre les travailleurs et travailleuses de rejoindre le syndicat. Cette stratégie a ses limites dans une situation de confinement sous Covid-19, mais le syndicat s'adapte et utilise d'autres méthodes, notamment des applications mobiles et des médias sociaux. Le syndicat a notamment mis au point une application qui offre aux travailleurs et travailleuses des liens vers des documents du syndicat et les textes des principales législations du travail. En outre, le syndicat a fait campagne avec succès en faveur du versement d'indemnités aux travailleurs et travailleuses licenciés en raison de la pandémie. Plus de 20.000 travailleurs et travailleuses du pays ont ainsi pu bénéficier du Fonds national de prévoyance.

Le syndicat indique qu'il se rend régulièrement sur des lieux de travail pour enquêter et confronter les employeurs aux infractions signalées par les travailleurs. Xolile Dlamini, membre de l'ATUSWA chez Swazi Africa Textile depuis cinq ans, explique pourquoi l'adhésion au syndicat est l'une des meilleures décisions qu'elle ait prises :

"Les travailleurs et travailleuses non syndiqués sont maltraités et insultés. Les employeurs nous mettent beaucoup de pression pour atteindre des objectifs, à tel point que l'on a parfois envie de pleurer. Le syndicat est l'organisation à laquelle il faut s'adresser quand on se sent maltraité. Il arrive que les employeurs vous disent que vous feriez bien de faire tout ce qu'ils vous demandent de faire. Mais une fois devenus membres du syndicat, nous sommes en mesure de leur rétorquer de cesser leur violence verbale et de respecter nos droits."

Afin d'attirer et de conserver ses membres, le syndicat fait campagne pour des emplois permanents et contre le recrutement de travailleurs par l'intermédiaire de courtiers en main-d'œuvre. En outre, le syndicat veut un salaire minimum d'au moins 3.500 E (229 $), des politiques de logement qui protègent les travailleurs et des fonds d'indemnisation contre les pertes d'emploi dues à la Covid-19.

"Les travailleurs et travailleuses d'Eswatini doivent s'unir et lutter pour un salaire vital et des conditions de travail décentes. Dans le cadre de notre campagne pour un salaire vital, nous revendiquons des hausses de salaire qui couvrent l'augmentation du coût de la vie et la montée des prix",

a déclaré Wander Mkhonza, Secrétaire général de l'ATUSWA.

Il n'est pas toujours facile de conserver les membres, car certains adhèrent au syndicat et le quittent au bout de quelques mois. Pour remédier à cette situation, le syndicat envisage d'augmenter les avantages offerts à ses membres et de négocier, puisque les conventions profitent à tous, des systèmes de précompte généralisé des cotisations syndicales (agency shop agreements). Cela pourrait attirer les travailleurs et travailleuses qui hésitent à adhérer au syndicat.

Bien qu’il existe pour le syndicat un potentiel d'augmentation de ses effectifs, il se heurte souvent à la résistance de certains employeurs. Par exemple, après avoir syndiqué 1.200 travailleurs et travailleuses chez Juris Manufactures, l'entreprise n'a reversé des cotisations que pour 482 adhérents. Les employeurs se comportent de la sorte même lorsque le syndicat a signé des accords de reconnaissance.

L’ ATUSWA soutient également les réformes du droit du travail qui protégeront les syndicats contre les pratiques antisyndicales et le dénigrement par les employeurs. Par exemple, l'entreprise taïwanaise FTM Garments continue de contrevenir aux droits syndicaux, notamment le droit d'organisation et de négociation collective, tandis que d'autres employeurs traînent le syndicat devant les tribunaux.

À l'heure actuelle, le syndicat a cinq affaires judiciaires en cours concernant des accords de reconnaissance, tandis que d'autres affaires sont pendantes devant la Commission de médiation, d'arbitrage et de conciliation.

Selon le syndicat, ces affaires sont une tentative des employeurs de mettre le syndicat en faillite, car elles prennent du temps et les frais de justice sont élevés.

À l'heure actuelle, les forums de négociation collective ne sont pas centralisés, et le syndicat souhaite que cela change. Dans les amendements proposés à la loi sur les relations sociales, le syndicat souhaite que les forums de négociation collective soient centralisés, car cela est bénéfique pour les travailleurs.

Le syndicat considère que l'éducation des travailleurs est fondamentale pour son développement et le renforcement du potentiel de ses membres. À cette fin, le syndicat a formé quatre éducateurs et a l'intention d'en augmenter le nombre afin de consacrer au moins 20 % de ses ressources à l'éducation.

L’ATUSWA fait partie des syndicats et des organisations de la société civile qui revendiquent des réformes démocratiques et la fin de la dernière monarchie absolue d'Afrique en Eswatini, dirigée par le roi Mswati III. Le syndicat estime que les luttes des communautés sont également des luttes des travailleurs.

“L’ ATUSWA revendique le changement. Nous voulons la démocratie, la liberté et l'égalité. Les députés pro-démocratie, Mduduzi Bacede Mabuza et Mthandeni Dube, qui sont accusés de “terrorisme”, doivent être libérés et la liberté d'expression doit être respectée. La richesse nationale ne peut être entre les mains du seul roi, mais doit être partagée équitablement,”

a martelé Jabu Chauke, 1er Secrétaire général adjoint de l’ ATUSWA et délégué syndical principal chez le fabricant de confection Fashion International Swaziland.