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Cinq choses à savoir à propos des protestations dans l’état américain du Wisconsin

28 février, 2011

Le Gouverneur de l’état américain du Wisconsin Scott Walker n’a pas perdu de temps pour entreprendre une grande chasse aux sorcières contre les syndicats. Un mois à peine après sa prise de fonctions, Walker se sert d’une hystérie provoquée par le déficit budgétaire comme excuse pour éliminer les syndicats du service public en supprimant leur droit à négocier collectivement sur les salaires et autres conditions de travail.

Une vague déferlante de protestations légitimes s’est abattue sur Madison, la capitale de l’état du Wisconsin et s’est étendue à d’autres états où différentes mesures législatives ont été prises par des mandataires ultraconservateurs qui souhaiteraient sans équivoque et du jour au lendemain ramener l’Amérique 80 ans en arrière.

(La région Amérique du Nord de l’ICEM a rejoint les protestations à Madison la semaine dernière en envoyant là-bas ses représentants aussi bien du Canada que des Etats-Unis et a envoyé une lettre laconique au Gouverneur Walker. La lettre signée des Vice-présidents nord-américains de l’ICEM Ken Neumann et Dave Coles déclare que M.Walker a « franchi une ligne idéologique, anti-syndicale et anti-démocratique ». L’entièreté de la lettre peut être visualisée ici en anglais)

A Madison, et en réalité à travers tout le territoire des Etats-Unis ainsi qu’en de nombreux endroits du globe, la résistance aux nombreuses et draconiennes coupes dans les dépenses publiques a indiqué qu’une limite idéologique avait été franchie. En début de matinée le 25 février, les Républicains qui contrôlent l’Assemblée, la chambre basse du Wisconsin, ont utilisé des subterfuges pour faire passer les mesures.

Ces mesures régressives auraient déjà reçu la signature de promulgation de la main de Walker si ce n’avait été pour le geste des Démocrates du Sénat du Wisconsin. Les Républicains y détiennent une majorité de 19 contre 14, mais il faut 20 présents pour prendre une décision. Les 14 sénateurs démocrates avaient quitté l’état pour empêcher que le quorum soit atteint.

Les coupes préconisées vont bien au-delà de la seule suppression du droit à négocier collectivement dans le secteur public. Les 144 pages de la proposition de loi contiennent des coupes sombres dans les soins de santé pour les familles à faibles revenus, réduiraient de US$976 millions au cours des deux prochaines années l’aide de l’état aux écoles locales et autoriserait le Gouverneur à privatiser de manière unilatérale toute entreprise de services à la collectivité sans avoir à solliciter d’offres publiques et sans l’accord de la Commission des Services publics. Et pour ajouter une insulte de plus aux travailleurs du public, la législation proposée impose une réduction de 5% des salaires en affectant le montant à un fonds pour les pensions du secteur public.

La bataille dans le Wisconsin est devenue un symbole de la lutte contre l’extrémisme de droite aux Etats-Unis. Mais pourquoi le reste du monde devrait-il se sentir concerné ? Considérant que les Etats-Unis sont toujours la plus grande économie du monde, voici les cinq choses qu’il faut savoir à propos de la lutte qui se joue au Wisconsin.

1. Tout ça n’est pas vraiment à propos des déficits ou des mesures d’austérité ; ce n’est qu’une excuse. Le Wisconsin était sur la voie d’un modeste boni budgétaire de US$ 120 millions pour cette année. Cependant, en prenant l’estimation la plus pessimiste concernant des problèmes réels ou supposé concernant Medicaid, l’assistance juridique, les prisons et la dette envers d’autres états, Walker crée l’illusion qu’il existe un déficit de US$ 137 millions.

Pour mettre les mystifications budgétaires de Walker en perspective, le producteur américain de films documentaires Robert Greenwald indique que retirer ne fusse que 151 militaires américains d’Iraq permettrait d’économiser plus d’argent que le déficit claironné par Walker. Exiger que des individus et entreprises fortunés paient une part raisonnable des taxes permettrait également de résoudre le problème. Les revenus seuls des 13 gestionnaires de hedge-funds américains les mieux payés (environ 1 milliard de dollars chacun), s’ils étaient taxés comme des revenus ordinaires au lieu de revenus du capital, ce qui constitue une faille du système fiscal américain, permettraient de dégager de quoi engager 68.000 enseignants.

2. Il ne s’agit pas d’intransigeance syndicale. Les syndicats du secteur public au Wisconsin ont accepté des réductions de salaire et d’avantages. Cependant, ils n’accepteront pas qu’on leur retire de manière permanente leur droit à négocier de futurs salaires et avantages. Et c’est ce que Walker exige.

3. Les travailleurs du service public ne sont la cause des problèmes du Wisconsin. Cependant, les travailleurs du secteur public sont le dernier segment du monde du travail américain à avoir un taux de syndicalisation significatif. La résistance au Wisconsin est une résistance à une nouvelle démagogie qui règne aux Etats-Unis et visant à détruire les syndicats du secteur public en tant que dernier bastion de la syndicalisation en Amérique. Walker et le monde des affaires conservateur derrière cette campagne utilisent clairement l’état du Midwest comme un test. Une défaite au Wisconsin sonnerait l’assaut contre les syndicats ailleurs aux Etats-Unis.

4. Pour arriver à leurs fins, les organisations financées généreusement par le monde des affaires et les médias de droite ont constamment monté l’opinion américaine contre les travailleurs du service public. Leur stratégie est de diriger le ressentiment des travailleurs du secteur privé à propos des choses qu’ils n’ont pas ou dont ils ont été privés, comme des pensions adéquates ou autres avantages, contre les travailleurs du secteur public qui les ont toujours. Diviser pour régner et détourner l’attention des riches qui ont spolié pratiquement toute la richesse de l’Amérique, telle est la règle du jeu.

5. De manière très poignante, la bataille au Wisconsin est déterminante pour la crédibilité politique nationale du mouvement syndical américain. Beaucoup de politiciens estiment que ça ne vaut pas la peine de prêter la moindre attention aux revendications des syndicats. Une déroute au Wisconsin scellerait la vision selon laquelle les syndicats sont trop faibles pour qu’on doive compter avec eux.

Purement et simplement, ce qui se passe au Wisconsin n’est rien de moins qu’une lutte des classes.

L’ICEM est catégorique pour dire qu’il faut arrêter le Gouverneur Walker au Wisconsin. Ecrivez des lettres de protestation à [email protected], ou par fax au : +1 608 267 8983. Veuillez copier vos messages à l’ICEM à l’adresse [email protected].