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RAPPORT : De la fabrication à la mobilité : les syndicats se préparent au secteur de la mobilité du futur

18 juillet, 2022Les futurs concepts de mobilité dans l’environnement urbain seront différents de ceux que nous connaissons aujourd'hui. Il y aura davantage de services partagés, moins de mobilité individuelle, une connectivité numérique entre les personnes, les véhicules et les infrastructures, ainsi que des véhicules autonomes.

RAPPORT

Du Global Worker No 1 juin 2022

Thème: La mobilité

Texte: Georg Leutert

L'avenir a déjà commencé avec l'ubérisation de la mobilité, avec des plateformes mettant en relation chauffeurs et usagers, impliquant des conditions de travail précaires pour leurs chauffeurs et autres personnels auxiliaires. Quels changements pouvons-nous en attendre et quel en sera l'impact sur le monde du travail et les syndicats ?    

Concrètement

Principaux éléments des concepts de mobilité future :

  • La quantité de voitures dans les zones urbaines doit diminuer pour sortir de l'impasse et réduire les émissions de gaz à effet de serre.
  • Pour maintenir, voire améliorer, le niveau de mobilité malgré une réduction importante de la mobilité individuelle (principalement en voiture), les services partagés doivent se développer de manière significative. Cela concerne aussi bien les formes existantes de transport public (trains, métros, tramways, bus, etc.) que les nouveaux services de covoiturage et de partage de véhicules (bus, taxis, motos, vélos, scooters, etc.).
  • Les opérateurs de plateformes numériques permettront la combinaison de tous les types de modes de transport en introduisant des solutions de transport intermodal ou multioptionnel flexibles.
  • La collecte et l'utilisation de mégadonnées (big data) au sein de systèmes d'intelligence artificielle est un élément clé de tous les projets visant à numériser les concepts de mobilité. 
  • Les nouvelles technologies permettront également l'introduction de véhicules autonomes (par exemple, les "robotstaxis"), nécessitant l'installation d'un éventail de dispositifs numériques (Internet, capteurs, radar, lidar, etc.), permettant une communication adéquate entre véhicules ainsi qu’entre les véhicules et l'infrastructure (routière).
  • Les véhicules autonomes permettent l'accès aux zones rurales par les transports publics. L'élimination des coûts de maind'œuvre rendrait plus rentable le service aux clients dans les régions peu peuplées.
  • Actuellement, ce sont principalement les entreprises technologiques qui ont pénétré ce marché de la mobilité, car elles disposent des logiciels, de la technologie et des produits nécessaires à la numérisation du secteur et à la mise en œuvre de nouveaux services et modes de transport.
  • Ces entreprises technologiques fondent leur action économique sur des modèles d’entreprise différents de ceux des fournisseurs de mobilité traditionnels. La présentation crédible d'un concept commercial pour avoir accès à du capital à risque est primordiale. Les bilans trimestriels et la rentabilité à court et moyen terme deviennent secondaires.
  • Les entreprises technologiques ne vont pas juste remplacer les fournisseurs de mobilité traditionnels. Il y aura de multiples formes de coopération et de réseaux. La question qui reste ouverte est celle de savoir qui créera la plus grande partie de la valeur ajoutée, qui fixera les conditions de travail, etc.
  • La réforme et la numérisation des systèmes de transport entraîneront des pertes d'emplois dans l'industrie traditionnelle des transports publics et de l'automobile. Elle créera de nouveaux emplois, notamment dans l'informatique, le secteur des services et des infrastructures numériques de transport. Il est fort probable que la quantité de nouveaux emplois compensera les emplois perdus.
  • Parmi les nouveaux emplois, il y aura des postes hautement qualifiés et bien rémunérés et il y aura d'autres emplois, principalement dans le domaine des services, qui seront souvent caractérisés par des conditions de travail précaires.

Le défi

 

 

Bien que l'analyse quantitative des pertes et des gains d'emplois ne semble pas trop problématique, l'écart de compétences entre l'emploi d'aujourd'hui et celui de demain constitue un défi de taille. 

En voici quelques exemples :

Arturo, 52

Travaille depuis 31 ans comme tourneur sur des machines CNC dans une usine de transmission d'une grande entreprise automobile en Argentine. Son usine va fermer dans les années à venir, car les véhicules électriques n'ont pas besoin d'une transmission (complexe). Au cours des trois dernières décennies, les principales compétences qu'Arturo a acquises sont les suivantes : usinage de haute précision des métaux, utilisation d'une machine à commande numérique, activités de maintenance, contrôle de qualité, intégration d'un processus de fabrication complexe, travail d’équipe et travail posté.
Que faut-il faire pour qu'Arturo se perfectionne et se requalifie afin de pouvoir trouver un nouvel emploi ? 

Pourquoi ne pas ajouter de nouvelles compétences dans le domaine de l'électronique et de la mécatronique pour lui permettre d'installer des infrastructures routières numériques nécessaires au fonctionnement sûr des véhicules autonomes ?

Christine, 43

A travaillé comme guichetière, puis comme surveillante de station pour assurer la sécurité et la propreté dans un réseau de métro français. Elle a perdu son travail de guichetière il y a plus de dix ans au profit d'une machine. L'intelligence artificielle rendra également son travail de surveillance superflu au cours des cinq prochaines années. Ses principales compétences aujourd'hui concernent la supervision d'un système de transport assez complexe, les systèmes de vigilance, les connaissances informatiques de base, le travail d’équipe et le travail posté.
Que faudra-t-il pour perfectionner et requalifier les compétences de Christine afin qu'elle puisse trouver un nouvel emploi ? Et pourquoi pas de nouvelles compétences informatiques afin qu'elle puisse surveiller l'introduction de flottes de robots-taxis à l'avenir ?

Kiara, 28

A été employée par un centre d'appels interentreprises en Inde au cours des huit dernières années. Elle était principalement chargée d’opérations de comptabilité pour le compte d’une grande entreprise américaine. Un nouveau logiciel rendra bientôt son activité superflue. Les compétences qu'elle a acquises se situent dans les domaines de la comptabilité et des programmes informatiques connexes, du contrôle d’une gestion de base et des relations avec la clientèle.
Que faudra-t-il pour que Kiara se perfectionne et se requalifie afin de pouvoir trouver un nouvel emploi ? Il lui faudra probablement un perfectionnement informatique sérieux et continu pour trouver un nouvel emploi avec une perspective à plus long terme.

Les études

 

 

Deux chercheurs allemands dans le domaine des systèmes de transport, les professeurs Andreas Knie et Weert Canzler, ont étudié l'impact sur le monde du travail des futurs systèmes de mobilité. (Les recherches correspondantes seront bientôt disponibles ici ...)

Le débat

Un débat stratégique est nécessaire pour s'assurer que les syndicats sont bien positionnés pour défendre les droits des travailleurs et travailleuses et pour assurer à l'avenir des emplois décents et une progression des salaires.

Quelques sujets essentiels :

  • Syndiquer Les études montrent que les grandes entreprises traditionnelles de l'industrie automobile et des transports publics perdent en taille et en importance. Comme ces entreprises comptent une syndicalisation assez élevée, les syndicats pourraient également être perdants. D'un autre côté, ces entreprises créent de nouvelles filiales et coentreprises pour concurrencer les entreprises technologiques. Les relations de négociation existantes pourraient donner aux syndicats un certain poids pour se développer dans les nouveaux domaines du marché de la mobilité.
  • Faire campagne Les études suggèrent que l'introduction de nouveaux concepts de mobilité nécessitera une redistribution de l'espace public. En outre, l'étude recommande que les syndicats, éventuellement en alliance avec des ONG, utilisent ces processus pour défendre et promouvoir des conditions de travail décentes en faisant campagne pour des règles à cet égard afin d'exclure tous les acteurs qui imposent des conditions de travail précaires et dangereuses.
  • Élaborer des stratégies Le processus concernant le débat stratégique sera lancé lors d'un atelier en Espagne pour les affiliés intéressés, du 27 au 29 septembre.

Le projet

 

En collaboration avec la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF), UNI Global Union et la fondation allemande Friedrich Ebert (FES), IndustriALL Global Union mène un projet sur trois ans (2021-2023) concernant les futurs concepts de mobilité afin de garantir un travail et un salaire décents. 

Mobility - IndustriALL

Principaux éléments du projet :

  • Élaboration d'une compréhension détaillée du concept et du marché de la mobilité du futur : structure, modes de transport, acteurs, emploi, modèles économiques, rôle du syndicat.
  • Analyse de l'impact sur la maind'œuvre, des exigences futures en matière de compétences et des besoins de formation.
  • Évaluation et prise en compte de tous les aspects liés au genre
  • Définition d’une perspective véritablement mondiale avec une contribution égale du Sud et du Nord.
  • Commande d'études à des experts externes
  • Lancement d'un débat stratégique entre les syndicats du secteur